Ma mémoire de bipolaire me joue encore des tours. Je ré-écoute et mixe ces jours-ci des trucs que j’ai numérisé. J’ai pris une centaine de vinyles y’a quelques années (en 2014 en fait selon MacOS) . En tout à l’époque ( de 1995 à 2005) j’ai acheté au moins 1000 vinyles de musique de type House Music. Je les achetais via Internet en UK, aux USA (à San Francisco dans une boutique en ligne qui a depuis fermé… ou à San Diego)

Je les ai numérisé en branchant la platine Vinyle à entrainement direct et cellule qui coute cher pour conserver la qualité sur un MacBook via le port USB qu’elle propose pour exploiter le protocole USB-Audio qui va bien. Et cela permet l’usage de logiciels de numérisation audio qui existent sur Mac et Windows ou Linux. J’ai encore tout ce qu’il faut chez moi pour le faire d’ailleurs. Plusieurs fois J’ai numérisé un disque d’un pote pour qu’il puisse de nouveau l’écouter sur son iPhone.

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exemple de disque acheté par dizaines à l’époque

De mémoire ça m’avait pris quelques jours, pour avoir au final environ 135 morceaux au format mp3, avec 256 kbit/sec d’échantillonnage pour avoir de la qualité audio et le rendu de la dynamique du vinyle. Et là ces jours-ci j’ai décidé de faire chauffer le Pioneer XDJ-RR que je me suis fait offrir il y a quelque temps… par une bande d’amis qui m’a depuis laissé tombé (et on s’est laissé tomber réciproquement en fait) en rajoutant dans ma solitude. Et voilà que les neurones musicaux ont décidé de mixer ces 120 morceaux en plusieurs fois, et en torturant un peu les voisins.

Ça donne ça, vous n’êtes pas obligé d’écouter, je ne force personne.

Mais le problème est que d’écouter ces morceaux m’a rappelé cette période et m’a fait revivre un jour terrible d’avril 2001 où j’étais dans une forte phase mixte de la bipolarité, alors que la journée avait été ensoleillé et très active pour moi dans l’après midi où j’allais très bien, je m’en souviens encore. On était le mercredi, Je faisait des projets pour faire la fête le week-end , en fin d’après midi j’avais mixé un truc avec des vinyls dans le genre des choses ci-dessus. C’est ensuite que ma cervelle avait bloqué sur une phrase qu’un mec rencontré quelques temps plus tôt qui m’avait dit:

mais pourquoi tu fais du mal aux gens qui t’aiment

parlant nommément d’un de mes ex, vu que ces deux là se connaissaient. Ma cervelle bipolaire avait buggé, et bouclait désormais sur cette phrase. J’en ai rapidement conclu que j’étais un monstre qui n’avait fait que du mal aux pauvres mecs qui m’avaient croisé et sourit un peu trop et ce depuis ma période étudiante. En effet récemment j’avais fait chier l’un deux, et pour deux autres j’avais rompu la relation de manière peu sympathique, j’en avais ghosté un, et l’autre je l’avais carrément insulté sur mon palier. Je me souviens m’être regardé dans la glace de la salle de bain et me dire “t’es un monstre” , et mon regard s’est alors fixé sur les somnifères de type barbiturique qui étaient là. J’ai regardé sur Internet la dose létale pour le produit et pris ma décision : Je devais tuer le monstre. Dans notre pathologie, y’a un truc : l’impulsivité, les décisions irréfléchies c’est ce qui fait faire des actes sans fondement sérieux. Là c’en était un beau.

J’ai envoyé 3 sms aux ex, dont un à celui à qui j’avais fait du mal , en expliquant qu’ils n’auraient plus jamais de mes nouvelles et que je m’excusais. A l’époque on avait des téléphones avec clavier chiant, c’était assez pénible de taper ça sans copier/coller. J’ai avalé les cachets avec de la vodka orange et me suis endormi progressivement . J’ai été réveillé par un appel, le choc du réveil m’a fait vomir une partie des cachets et je me suis endormi aussitôt.

Je me suis réveillé le lendemain à l’hôpital où j’avais été conduit par les pompiers alertés par le voisin qui avait vu la lumière chez moi, voyait mon intérieur de sa fenêtre et avait le double des clés.. J’ai eu de la chance en faite : je n’avais pas tiré les rideaux… et l’appel téléphonique qui m’avait fait vomir m’a beaucoup aidé aussi…

On m’a gardé quelques jours et j’ai pris moi même la décision de sortir le plus vite de cet hôpital. C’est là qu’un cardiologue m’avait expliqué que j’avais un coeur de marathonien qu’il ne fallait pas lui faire de mal comme j’avais fait : L’arrêter deux fois , et il a redémarré tout seul selon les pompiers.

Je revois encore la chambre de l’hôpital et personne qui n’est venu me voir, forcément. Je suis rentré péniblement à moitié assommé chez moi , et le voisin m’a aidé à ranger le bordel et le téléphone avec du vomi dessus… Téléphone qui avait encore de la batterie et indiquait 3 appels en absence d’un même numéro. Celui de l’ex victime de moi, qui voulait à tout prix avoir des nouvelles. Je l’ai appelé en le rassurant, on devait se rappeller : je ne l’ai pas fait… alors que je voulais à tout prix le revoir.

J’ai expliqué à mes potes que j’avais fait une très grosse connerie et les affaires habituelles ont repris. J’ai commencé un nouveau job 15 jours plus tard comme si de rien n’était.. avec un traitement médical à base d’antidépresseurs qui va me faire faire de plus belles phases maniaques et donc déconner encore plus : J’aurai du consulter la notice du médicament et on aurait aussitôt diagnostiqué la bipolarité au lieu de me dire dépressif sans jamais me demander comment c’était passé la journée maudite. 15 ans de perdus, et beaucoup de problèmes d’addictions et de comportement qui auraient pu être évités.

Voilà ce que me rappellent certains de ces morceaux de musique, un effet madeleine de Proust sur une mémoire abimée par la maladie.

Mais là je suis plus joyeux hein. Et j’ai désormais un traitement et un suivi psy qui font que les épisodes de la maladie sont moins intenses, même si toujours présents.

By rva

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